La cybersécurité s’impose aujourd’hui comme un pilier fondamental du développement économique et social du Royaume du Maroc. Dans un contexte où la transformation digitale s’accélère, le Maroc se positionne en acteur stratégique pour garantir un environnement numérique sécurisé. En novembre 2023, le Royaume a dévoilé des données cruciales sur l’état de la cybersécurité dans le pays, notamment à travers le premier baromètre réalisé en partenariat avec PwC Maroc, qui a révélé des préoccupations majeures quant à la résilience des systèmes numériques face aux menaces cybernétiques.
Le Maroc s’inscrit dans une dynamique proactive avec l’adoption de sa Stratégie Nationale de Cybersécurité à l’horizon 2030. Cette initiative vise à renforcer les infrastructures numériques du pays, tout en mettant l’accent sur la gouvernance et la formation des ressources humaines dans le domaine de la cybersécurité. Le Royaume reconnaît l’importance capitale de protéger ses systèmes d’information sensibles, dans un monde où les cyberattaques se multiplient de manière exponentielle. En 2023, près de 43 % des entreprises marocaines considéraient les cyberattaques comme la menace la plus critique pour leurs activités, un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes, où le numérique était perçu comme une opportunité de croissance plutôt qu’une vulnérabilité.

Les secteurs public et privé ont intensifié leurs efforts pour se protéger contre les cybermenaces. Les infrastructures vitales comme les services financiers, les télécommunications et l’énergie sont particulièrement ciblées par des cyberattaques sophistiquées. Dans ce contexte, le Maroc a intensifié sa coopération internationale, rejoignant des initiatives comme la Convention de Budapest sur la cybercriminalité et collaborant avec des pays voisins pour échanger des informations et des stratégies de défense contre ces nouvelles menaces transnationales.
Une des forces de cette stratégie repose sur une meilleure intégration de la cyberrésilience. En effet, l’étude menée par l’Association des Utilisateurs des Systèmes d’Information au Maroc (AUSIM) en collaboration avec PwC a révélé que la majorité des entreprises marocaines restent en phase de consolidation dans leur approche de la cybersécurité. Plus de 70 % d’entre elles estiment avoir encore un long chemin à parcourir pour atteindre un niveau de cyberrésilience satisfaisant. Cependant, des progrès significatifs ont été enregistrés dans la mise en place de mécanismes d’alerte précoce et la gestion des incidents, notamment grâce à l’intégration de technologies d’intelligence artificielle et de machine learning qui permettent de mieux détecter les anomalies et les tentatives d’intrusion.
L’implication croissante du secteur public dans la cybersécurité a également été renforcée avec la mise en place de la Direction Générale de la Sécurité des Systèmes d’Information (DGSSI), qui joue un rôle central dans la coordination des efforts à l’échelle nationale. La DGSSI, en plus de renforcer le cadre juridique du pays, veille à ce que les entreprises et les institutions publiques respectent des normes de sécurité strictes pour protéger les données sensibles des citoyens et des organisations.
Cependant, la cybersécurité ne se limite pas à la protection des infrastructures critiques. Elle englobe également la lutte contre la cybercriminalité. Selon des statistiques de la DGSSI, les cas de cybercriminalité ont considérablement augmenté en 2023, notamment en raison de l’utilisation croissante des services en ligne. Le Maroc a lancé plusieurs campagnes de sensibilisation pour informer les citoyens des risques associés à la navigation sur Internet et à l’utilisation des technologies numériques. Des initiatives telles que la plateforme e-blagh permettent aux citoyens de signaler des contenus numériques criminels, facilitant ainsi l’intervention rapide des autorités.

La formation des talents en cybersécurité constitue un autre axe stratégique de la feuille de route à l’horizon 2030. Le Royaume s’efforce de combler le déficit en compétences dans ce domaine en multipliant les programmes de formation dans les universités et les centres spécialisés. Plusieurs partenariats ont vu le jour avec des institutions internationales pour fournir des certifications en cybersécurité et former la prochaine génération d’experts marocains. L’ambition est claire : faire du Maroc un hub régional en matière de cybersécurité, à l’instar de sa position stratégique dans d’autres secteurs économiques.
Le Maroc s’appuie également sur des investissements croissants dans les nouvelles technologies pour améliorer ses capacités de défense cybernétique. En 2023, le gouvernement a alloué un budget conséquent pour moderniser les infrastructures numériques, tout en encourageant le développement de solutions locales innovantes. Des startups marocaines émergent dans le secteur de la cybersécurité, proposant des solutions adaptées aux réalités locales, notamment dans les secteurs bancaire et de l’e-commerce, où la protection des transactions en ligne est devenue une priorité absolue.
La cybersécurité est donc devenue un impératif pour le Royaume du Maroc, tant sur le plan de la protection de ses infrastructures nationales que sur celui de la compétitivité de son économie numérique. Dans un monde de plus en plus connecté, où les cybermenaces sont devenues omniprésentes, le Maroc s’est engagé dans une transformation numérique sécurisée, visant à instaurer un climat de confiance pour les entreprises, les institutions et les citoyens. Si les défis restent importants, notamment en matière de sensibilisation et de formation, les initiatives prises ces dernières années placent le Royaume sur une trajectoire prometteuse pour devenir un acteur majeur de la cybersécurité sur le continent africain.
En conclusion, l’avenir numérique du Maroc dépendra largement de sa capacité à construire une cyber-résilience robuste, à former des experts compétents et à s’adapter en continu aux nouvelles menaces. Avec sa stratégie à l’horizon 2030 et les efforts de collaboration internationale, le Royaume se dote des outils nécessaires pour faire face aux enjeux du monde numérique de demain.

Yassine EL YATTIOUI
– Secrétaire général de NejMaroc : Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation.
– Chercheur universitaire associé à NejMaroc et à la Benemerita Universidad de Puebla (BUAP) au Mexique.
– Analyste, conférencier et expert en relations internationales, politiques institutionnelles, géopolitique et diplomatie.