Le Maroc à la tête d’un virage stratégique pour l’Afrique : vers une intelligence artificielle éthique et souveraine

En mars 2025, le Royaume du Maroc assure la présidence tournante du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine (CPS-UA). À cette occasion, une réunion ministérielle historique s’est tenue par visioconférence, marquant la première session de l’Union africaine entièrement consacrée à l’intelligence artificielle (IA) au niveau ministériel.

Présidée par M. Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, cette rencontre a mis en lumière la volonté du Maroc de positionner l’Afrique au cœur de la révolution technologique mondiale, tout en veillant à ce que cette transformation soit éthique, inclusive et souveraine.

Une vision marocaine forte : « Une IA africaine, par l’Afrique et pour l’Afrique »

Dans son intervention, Nasser Bourita a souligné l’urgence d’une mobilisation continentale pour construire une IA adaptée aux spécificités africaines. Il a insisté sur la nécessité de promouvoir une intelligence artificielle ancrée dans les réalités locales, soucieuse d’éthique, de souveraineté numérique et de responsabilité sociale.

« L’IA n’attendra pas que nous soyons prêts. Elle est déjà là, remodelant la dynamique du pouvoir. Le choix est simple : soit nous nous unissons pour maîtriser cette transformation, soit nous en subirons les conséquences. »Nasser Bourita

Les défis critiques de l’IA en Afrique

Malgré son potentiel considérable, l’intelligence artificielle en Afrique se heurte à des obstacles structurels qu’il est urgent de lever.

Le premier défi réside dans l’accès à Internet : près de 60 % des Africains en sont encore privés, ce qui freine l’inclusion numérique et l’accès équitable aux innovations technologiques.

S’ajoute à cela un déséquilibre préoccupant dans la production de données : moins de 2 % des données utilisées pour entraîner les systèmes d’IA proviennent du continent africain, rendant ces technologies souvent inadaptées aux réalités locales.

Enfin, l’Afrique fait face à un déficit majeur en matière de compétences. Seul 1 % des talents mondiaux en IA réside sur le continent, tandis qu’environ 70 000 experts africains ont choisi de s’expatrier, accentuant la fuite des cerveaux.

Le Royaume du Maroc, catalyseur d’une stratégie africaine de l’IA

Le Maroc affirme son rôle de leader à travers des actions concrètes et structurantes. À Rabat, le Royaume accueille le Centre africain de l’IA de l’UNESCO, un espace stratégique dédié à la recherche, à l’innovation et au dialogue politique, plaçant le Maroc au cœur des dynamiques numériques africaines.

Sur le plan national, le pays mise résolument sur l’éducation en intégrant progressivement l’intelligence artificielle dans les programmes scolaires dès le plus jeune âge. Cette initiative vise à préparer une nouvelle génération de talents, à même de comprendre et maîtriser les technologies de demain.

À l’échelle internationale, le Maroc se distingue également par son engagement en faveur d’une gouvernance éthique de l’IA. Il est cofondateur du Groupe des Amis de l’IA pour le développement durable au sein des Nations Unies, un collectif de plus de 70 pays œuvrant pour une IA alignée sur les Objectifs de développement durable (ODD).

Quand l’innovation bouscule la sécurité : les deux visages de l’IA

Si l’IA représente un levier majeur pour accélérer le développement du continent, elle comporte aussi des risques importants lorsqu’elle est utilisée sans encadrement ni régulation.

Les chiffres sont alarmants : depuis 2019, le nombre de deepfakes a augmenté de plus de 900 %, compromettant la fiabilité de l’information et amplifiant les campagnes de désinformation. Dans le même temps, les cyberattaques alimentées par l’IA ont connu une hausse de 300 % entre 2019 et 2022, visant aussi bien les institutions publiques que les infrastructures stratégiques.

Plus inquiétant encore, 40 % des groupes terroristes dans le monde utilisent désormais des drones autonomes, illustrant le potentiel destructeur de cette technologie lorsqu’elle est détournée de ses objectifs.

Vers une stratégie africaine coordonnée

Conscient de ces enjeux, le Maroc appelle à une réponse collective et structurée à l’échelle continentale. Cette stratégie repose sur la conviction que seule une coopération africaine renforcée permettra de transformer les défis actuels en opportunités durables.

Parmi les propositions avancées, figure la création d’un réseau africain des centres nationaux d’IA, destiné à mutualiser les expertises, renforcer la coopération scientifique et partager les bonnes pratiques.

Le Maroc propose également la mise en place d’un groupe d’experts africains chargé de piloter la mise en œuvre d’une stratégie continentale de l’IA à la fois cohérente, inclusive et sécurisée. L’objectif est de garantir la souveraineté technologique de l’Afrique tout en assurant une adoption responsable et bénéfique de l’intelligence artificielle.

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